PEUR(S) DU NOIR

Publié le par Pénélope Lemarchand

peur.jpgREALISATEURS : Blutch, Charles Burns, Marie Caillou...
ACTEURS (voix) : Aure Atoka, Arthur H...
DUREE : 1h25'


     Pendant qu'une femme énumère ses petites peurs artificielles et sophistiquées, quelques vrais cauchemars se déroulent, se déclinent, jusqu'à ce que la lumière reviennent...

     Tout d'abord, c'est une expérience esthétique magnifique. Chaque section est dessinée dans un style différent, mais le noir et blanc et une certaine unité de ton donnent à l'ensemble une grande homogénéité et forment non pas un recueil ni une anthologie, mais bien un film.
     Après, chacun sans doute réagit selon ses propres peurs, et ses propres démons intérieurs. D'autant qu'à mon avis le film n'est pas fait pour "faire peur". Il est fait pour dessiner des univers dans lesquels la peur se sent chez elle.
     La voix (de Nicole Garcia) et les dessins géométriques qui l'accompagnent (de Pierre Di Sciullo) évoque pour moi, de manière presque agaçante, toutes les fausses peurs, les peur intellectuelles et de pacotilles, du personne qui - en vérité - n'a rien à craindre. Quand sa seule peur c'est d'être réactionnaire et de devenir "centre gauche", on peut se dire que le noir ne doit pas être très terrorisant. D'ailleurs ces peurs désincarnées, ces peurs de neuronnes et non pas de nerfs, son illustrées par des figures abstraites et désincarnées.

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     Beaucoup moins abstraites et désincarnées - et le contraste n'en est que plus réussi - sont les autres séquences, que j'ai trouvées toutes attachantes, et toutes merveilleusement bien réalisées. Les chiens de Blutch, sorte de conte voltairien à la fois violent et cynique sur la part de bestialité que l'homme tient toujours en laisse ; le fantasme de la femme mante-religieuse chez Charles Bunch, qui séduit pour mieux détruire ; l'esprit du mort qui vient hanter les vivants pour assurer sa vengeance chez Marie Caillou ; ou encore, mon préféré, la maison hantée de souvenir et de mort, merveilleusement mise en image par Richard McGuire.

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     Dans toutes ces "figures de la peur", un motif revient plusieurs fois, que j'ai trouvé particulièrement troublant. Un femme terrassée par un chien, un homme terrassé par sa copine, une petite fille terrassée par un petit garçon. Et je me suis demandée si de tous, ça n'était pas celui-là, le motif le plus universel de la peur. Se retrouver tout à coup à la merci de quelqu'un qui vous écrase, qui vous oppresse, qui vous fait perdre le souffle, qui va tenir entre ses main votre vie et votre mort.

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     Et la peur du noir, c'est peut-être ça aussi : la peur que de nulle part un homme ou une bête surgisse et vous écrase, vous paralyse, vous etouffe, et vous amène à la mort, au moment où vous fermerez les yeux une dernière fois, sans savoir ce qu'il y aura à voir quand vous les rouvrirez...

Publié dans Mes Tops

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S
En te lisant je me dis<br /> c'est plus qu'assister à la projection d'un film<br /> cela ressemble à un voyage initiatique au cœur de ses propres peurs (les plus terribles)<br /> j'ai enfin vu "Juno"<br /> terrible<br /> <br /> à plus<br /> <br /> bisous
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F
Salut Péné, je n'avais jamais entendu parler de ce film, la première chose que j'ai remarqué sur ton article, c'est que ce bon Arthur H, fait une des voix. Ca tombe bien, j'adore ce mec et surtout sa voix suave et chaude. Après avoir lu l'article, comme d'habitude, grosse envie d'aller au ciné, merci pour ma bourse ! a bientot.
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